.s
Curieux monde...
Nous vivons décidément dans un bien curieux monde… Un monde où « l’infiniment petit » vient terrasser « l’infiniment grand ». Un monde où la mondialisation, encensée par certains, nous explose à la figure. Un monde où le « tout privé » règne en maitre mais qui, au moindre « coup de Trafalgar », vient larmoyer aux pieds des Etats pour être sauvé de la Banqueroute. Avec une Europe qui a oublié qu’avant d’être un vaste marché de libre circulation des personnes et des marchandises, elle se devait d’être une entité qui protège et défend.
Nous vivons dans une bien curieuse société, où les « sans grades » d’hier, qu’ils soient éboueurs ou caissières de supermarché, deviennent les « grands hommes et femmes » du moment. Les soignants, hier encore gazés par les forces de l’ordre parce qu’ils manifestaient pour plus de moyens, deviennent, à 20H00, nos héros que l’on applaudit aux balcons de France. Curieuse société où l’habitant de la Capitale, si prompt à mépriser la Province, vient pourtant en catastrophe s’y réfugier piteusement dès le confinement prononcé. Curieux gouvernement qui élève la santé des salariés au rang de cause nationale alors qu’il supprime, en début de mandat, les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) au sein des entreprises. Curieux enfin d’entendre que les masques, le gel hydroalcoolique et les tests ne sont pas nécessaires, non pas parce ce que c’est vrai mais parce qu’on n’en a pas…
Nous vivons dans une bien curieuse entreprise où, dans une longue tirade digne des plus grandes tragédies grecques, on affirme vouloir maintenant changer de boussole et de priorités, mais en maintenant coûte que coûte un plan de départs volontaires de 113 personnes et les procédures de licenciement en cours. Surprenant de voir le télétravail soudainement généralisé alors que son extension était refusée il y a quelques mois sous des prétextes fallacieux. Curieux d’entendre que personne n’aurait pu prévoir ce qui se passe alors qu’un « Danger Grave et Imminent » déclenché il y a deux ans a été enterré et laissé sans suite (…sauf lorsque des millions d’euros sont en jeu…). On exhume des valeurs de solidarité, d’humanisme, de quête de sens mais on conteste les conclusions d’une commission d’enquête de la CPAM à la suite du décès d’un salarié pendant ses heures de travail.
Bien sûr, certains pourraient nous opposer les sempiternels « pas de polémiques » ou « ce n’est pas le moment » … mais alors, c’est quand le bon moment ?!?!
Nous aimerions tellement croire en un changement de cap ou une nouvelle vision, une concorde nationale où les adversaires d’hier marcheraient main dans la main, tirant les enseignements du passé et intégrant les enjeux de demain.
En vain… Notre monde a-t-il changé depuis la crise financière de 2008 ? La crise climatique a-t-elle fait infléchir nos sociétés modernes ? Ne nous leurrons pas ! Nos dirigeants nous avertissent déjà que nos acquis d’hier se transforment en entraves, qu’il sera indispensable de faire des efforts, que nous sommes déjà en sureffectif, que le PDV est un mal nécessaire, que notre organisation a un problème de coûts qui faudra régler et que nos commerciaux sont coupables de paresse intellectuelle et d’opportunisme.
Décidément, les vieux reflexes ont la vie dure… Curieux monde...